Exposition à l’aluminium par l’alimentation
Définitions et présentation des travaux de l’Agence
L’aluminium est un métal naturellement présent dans l’environnement. C’est le 3ème élément le plus abondant dans la croûte terrestre, dont il représente 8%. Il est présent dans les sols et les eaux, y compris celles utilisées pour produire de l’eau destinée à la consommation humaine. Il peut donc se retrouver dans les ressources en eau ou les aliments. Point sur les travaux que mène l’Anses sur les risques liés à l’exposition à l’aluminium par voie alimentaire.
La présence d’aluminium dans les aliments reflète sa présence naturelle dans l’environnement et sa dissémination via des usages industriels.
Du fait de ses nombreuses propriétés physico-chimiques (maléabilité, bonne conductivité électrique et chimique, basse densité, etc.) l’aluminium est un métal très utilisé dans de nombreux domaines :
- industrie du bâtiment, transports ;
- industrie agroalimentaire (conservation, colorants, additifs, etc.), industrie de l’emballage (boîtes de boissons, barquettes alimentaires, etc.), fabrication d’ustensiles de cuisine ;
- industrie pharmaceutique (pansements gastriques, antiacides, adjuvants de vaccins, verre pharmaceutique, etc.) ;
- chirurgie (céramiques en chirurgie orthopédique et dentaire, alliages dans les implants orthopédiques, etc.) ;
- cosmétologie (antiperspirants, colorants capillaires, etc.) ;
- traitement des eaux d’alimentation (agent floculant et clarifiant).
Par quelles voies sommes-nous exposés à l’aluminium ?
Chez l’Homme, les principales voies d’exposition chronique à l’aluminium sont les voies orale (alimentation, eau, médicaments à prise orale), cutanée (cosmétique et anti-transpirants) et respiratoire (inhalation de poussières).
En ce qui concerne la voie orale, la population générale est essentiellement exposée à l’aluminium par les aliments, les apports par l’eau contribuant à moins de 5% des apports totaux.
Les principaux aliments contribuant à l’apport en aluminium sont :
- pour les nourrissons : les légumes, le lait et les compotes ;
- pour les enfants, les adolescents et les adultes : les produits céréaliers, les légumes.
Les additifs à base d’aluminium autorisés dans l’alimentation (comme colorant, antiagglomérant, affermissant, etc.) constituent une très faible source d’exposition.
Les produits de santé comme les antiacides ou les pansements gastro-intestinaux contenant de fortes teneurs en aluminium, peuvent exposer pendant le traitement à des doses bien supérieures à celles apportées par l’alimentation.
L’utilisation de produits cosmétiques contenant de l’aluminium contribue également à cette exposition.
En dehors de l’univers professionnel, où l’atmosphère des ateliers peut contenir des teneurs élevées en aluminium, l’inhalation est une voie d’exposition minoritaire.
Aluminium et eau de boisson
La présence d’aluminium dans l’eau de boisson peut résulter de sa présence naturelle dans les ressources en eau ou résulter du processus de potabilisation. En effet, lors du traitement de l’eau pour produire de l’eau destinée à la consommation humaine, les sels d’aluminium peuvent être utilisés lors de l’étape dite « de floculation ». Ce traitement permet notamment de réduire la présence de micro-organismes dans l’eau (bactéries, virus, parasites), d’en améliorer la couleur et la turbidité et d’atteindre une qualité d’eau garantissant l’efficacité de l’étape de désinfection.
Cependant, si les traitements de potabilisation sont correctement optimisés, l’aluminium utilisé pour le traitement est éliminé à l’issue de son utilisation.
Il est nécessaire que les installations de traitement utilisant des sels d’aluminium soient conçues et exploitées de manière à garantir en permanence le respect de la référence de qualité fixée en France à 200 µg/L en accord avec les préconisations de l’OMS.
Depuis 2004, le suivi de l’aluminium dans l’eau distribuée est renforcé dès lors que de l’aluminium est utilisé au cours du processus de traitement de l’eau.
Au cours des dix dernières années, les taux de dépassements de la référence de qualité de l’eau ont diminué : 2,8% des analyses ponctuelles recensées dans la base SISE Eaux[1] entre 1999 et 2003 contre 1,8% entre 2003 et 2009.
Toxicité de l’aluminium
Les effets toxiques de l’aluminium portent essentiellement sur le système nerveux central (encéphalopathies, troubles psychomoteurs) et sur le tissu osseux.
Les effets cliniques avérés de l’aluminium ont toujours été observés dans des situations de fortes expositions chroniques : patients insuffisants rénaux dialysés, alimentation parentérale, personnes professionnellement exposées. Chez les travailleurs la toxicité se manifeste principalement aux niveaux pulmonaire et nerveux.
Mais à l’heure actuelle, aucune étude n’a mis en évidence de tels effets dans la population générale, exposée à travers l’alimentation courante ou les produits de santé.
L’EFSA[2] a également retenu une Dose Hebdomadaire Tolérable Provisoire (DHTP) de 1 mg/kg pc/semaine (diminution par 7 de la précédente DHTP) en 2008. Le JECFA[3], en 2011, a revu à la hausse la valeur précédemment établie en 2006, en fixant la DHTP à 2 mg/kg pc/semaine. Cette DHTP s’applique à tous les composés d’aluminium présents dans les aliments.
Que fait l’Anses sur l’aluminium ?
Après un rapport conjoint avec l’InVS et l’Afssaps (ANSM) en 2003 sur l’évaluation des risques sanitaires liés à l’aluminium, l’Anses a conduit plusieurs travaux concernant l’exposition des Français à cette substance via leur alimentation, notamment :
La deuxième étude de l’alimentation totale (EAT 2)
La deuxième étude française de l’alimentation totale (EAT 2) montre que l’exposition moyenne de la population française à l’aluminium est estimée à 0,28 mg/kg pc/semaine chez les adultes et 0,42 mg/kg pc/semaine chez les enfants (de 3 à 17 ans).
L’étude EAT 2 constitue l’étude la plus représentative compte tenu du nombre d’aliments analysé, de la méthodologie utilisée (pratique de la préparation des repas au plus proche de la réalité) et du gain en sensibilité des méthodes analytiques utilisées.
L’exposition moyenne française est inférieure à la DHTP définie par l’EFSA (1 mg/kg pc/semaine). L’examen de la distribution de l’ensemble des résultats montre cependant 0,2% de dépassement de la DHTP chez les adultes et 1,6% chez les enfants (de 3 à 17 ans).
Compte tenu du caractère ubiquitaire de l’aluminium dans l’environnement, pratiquement toutes les denrées en contiennent naturellement, le cacao et le thé présentant des teneurs élevées (50 mg/kg relevé pour le chocolat).
L’EAT 2, en prenant en compte les consommations des différents produits, a donc permis de mettre en évidence les contributeurs majoritaires. Pour les adultes, ce sont les produits céréaliers (à hauteur de 20%), les légumes (14%), le thé (11%). Chez les enfants, les produits céréaliers contribuent à hauteur de 27%, les légumes à hauteur de 12%, le lait et produits laitiers 9%, le chocolat 5%. Tout le reste des apports est réparti dans de multiples denrées.
Quant à l’eau, elle reste un contributeur minoritaire, et la contribution par les sodas n’est que de 0,4% chez l’adulte.
L’étude de l’alimentation totale infantile
Dans le cadre de l’étude de l’alimentation totale infantile actuellement menée par l’Anses, les concentrations en aluminium sont en cours de mesure dans l’ensemble du régime alimentaire des enfants de 0 à 3 ans.
Les résultats de cette étude seront publiés (en fonction des délais d’échantillonage et d’analyse) en début d’année 2015.
[1] Base de données du ministère de la Santé colligeant l’ensemble des résultats du contrôle sanitaire des eaux destinées à la consommation humaine
[2] EFSA, Safety of aluminium from dietary intake, EFSA Journal (2008) 754, 1-34.
[3] Joint FAO/WHO Expert Committee on Food Additives (JECFA), Summary and conclusions of the seventy-fourth meeting, Rome, 14-23 June 2011, JECFA/74/SC.